Révéler l’Unique
AbdAllah Yahya Darolles
08-02-2000
Qul Huwa-Llâhu Ahad... Dis : Lui Dieu est Un...
C’est ainsi que le Coran nous rappelle et nous appelle à l’Unité de Dieu dans la plus synthétique des sourates, appelée la sourate de la Sincérité, dont il est dit que celui qui la récite véritablement, c’est-à-dire avec toute la concentration des puissances de son être, est l’égal de celui qui récite le tiers du Coran. Cette sourate est seulement suivie de deux autres, appelées couramment « les sourates de protection de Dieu », comme si le rappel et l’appel à l’Unité, à la fin, nécessitait une protection divine particulière en raison du déchaînement des puissances d’illusion, d’obscurcissement et de tentation qui essaieront jusqu’au bout d’imposer l’erreur individualiste et dualiste, erreur dont le Shaykh Abd al-Wahid Yahya, René Guénon, dénonçait le caractère proprement antéchristique.
La révélation de l’Unité constitue le fondement et l’aboutissement de toute religion orthodoxe. Elle constitue le seul et ultime but de toute réalisation spirituelle. À travers cette réalisation, il s’agit de connaître réellement Dieu l’Unique dont il faut révéler l’Unité au lieu de chercher à la pénétrer ou à l’engendrer imaginairement car, nous dit la même sourate, « Dieu est l’Impénétrable Soutien Universel, aç-Çamad, Il n’engendre pas et Il n’est pas engendré ». De sorte qu’Il ne saurait susciter la dualité pas plus qu’Il ne peut être atteint par elle. Cette Unité, au contraire, est et pré-existe de toute éternité et, s’il nous appartient de la révéler, c’est que la démarche initiatique n’est en aucun cas une attente mystique et passive, mais bien une démarche active à travers l’effort spirituel, jahd, accompli à partir de la situation spatio-temporelle dans laquelle nous avons été providentiellement placés. Et s’il nous est permis de révéler l’Unique, et donc, d’en témoigner, c'est parce qu’à travers nous c’est, bien évidemment, Dieu Lui-même qui la révèle, au-delà de notre incarnation. Car le Témoin, as-Shahid, est un des Noms de Dieu et, dans la doctrine islamique de l’Unicité de l’existence (Wahdat-al-Wujûd), l’Absolu est Lui-même interprété comme le seul véritable Témoin de la Réalité, de la Vérité, al-Haqq.
C’est, en fait, l’individualité, le « principe d’individuation» (principium individuationis) des scolastiques, qui constitue l’écran qui reflète ou voile sous forme duelle et multiple, l’Unique Témoin. Comme le disait le Shaykh Abd al-Wahid Yahya Guénon :
L’affirmation de l’Unité est partout mais à l’origine, elle n’avait pas besoin d’être formulée expressément pour apparaître comme la plus évidente de toutes les vérités, car les hommes étaient trop près du Principe pour la méconnaître ou la perdre de vue. Maintenant, au contraire, on peut dire que la plupart d’entre eux, engagés tout entiers dans la multiplicité et ayant perdu la connaissance intuitive des vérités d’ordre supérieur, ne parviennent qu’avec peine à la compréhension de l’Unité ; et c’est pourquoi, il devient peu à peu nécessaire, au cours de l’histoire de l’humanité terrestre, de formuler cette affirmation de l’Unité à maintes reprises et de plus en plus nettement, nous pourrions dire de plus en plus énergiquement. [...] L’ésotérisme islamique ne fait qu’expliquer et développer tout ce qui est contenu dans cette affirmation et toutes les conséquences qui en dérivent... S’il le fait souvent en termes identiques au Vedanta ou au Taoïsme, c’est parce que la Vérité est une et parce que, dans cet ordre principiel... l’Unité se traduit nécessairement jusque dans l’expression elle-même.
Cette Unité qui est Essence même de Dieu ne peut être connue qu’à travers la pure servitude de l’Unique, qu’à la condition, en quelque sorte, de devenir comme René Guénon lui-même, des « abd al-Wahid» et d’accéder ainsi à l’extinction dans Son Unité, dans Sa Solitude, solitude véritable qui englobe et n’exclue pas, n’isole pas, solitude qui n’est pas, bien entendu, celle que revendiquent certains individus isolés.
À la tradition prophétique qui enjoint : « Nulle cible au-delà de Dieu », la « Bagâvad Gita » renvoie en écho : « la vie comme un arc, l’âme comme une flèche, le centre de la cible comme Esprit absolu ». C’est, en effet, au moyen de la vie et de la tension que lui imprime la voie comme corde, que l’âme peut être toute entière concentrée sur la Vérité, cette unique cible apparaissant symboliquement comme circonférence et point central. Ce symbole unique est rendu partiellement visible, à l’origine, dans l’Hindouisme à travers la lettre sacrée na et dans l’Islam, à la fin, par la lettre nun. Ce symbolisme de la lettre nun a fait beaucoup coulé d’encre et, pourrait-on ajouter, produit, aussi, nombre de spéculations, en relation avec d’autres symboles analogues, liés à la perspective eschatologique.
En effet, en la considérant séparée de l’arc supérieur, l’on en retient le plus souvent l’idée d’une arche de la fin des temps qu’il y aurait lieu de construire par la seule et pure volonté humaine, afin d’y rassembler, « d’y entasser », ont dit certains, les images éparses de traditions anciennes, plutôt que des symboles, par nature transparents et vivants et donc non susceptibles de se laisser enfermer dans un tel système. Cette vision dualiste, séparative de ce qui est pourtant un symbole unique, ignore, de ce fait, que le Shaykh Abd al-Wahid Yahya s’empressait de préciser que le nun, symbole de la naissance était immédiatement précédée de la lettre mim, elle-même circonférence, symbolisant la mort. Et ce n’est que par cette mort à l’individualité, à l’ignorance, pour tout dire, que peut être réalisée la plénitude du symbole évoqué, à la fois solaire et polaire, unique dans son expression et qui n’est autre que celui de la manifestation finale du Messie de la fin, que nous tous, juifs, chrétiens et musulmans, attendons en principe et qui, pour les chrétiens et musulmans, n’est autre que le Christ de la seconde venue, Sayydina Issa (alayhi-s-salam) ; le Christ, auquel tentera de s’opposer l’Antéchrist, le dajjal, l’imposteur dont l’illusion trouve sa source, nous dit René Guénon, dans l’erreur dualiste, irrémédiablement liée à l’individualisme, et qui tentera, selon la parole évangélique, « jusqu’aux élus, si cela était possible ».
L’Antéchrist ne fera que reproduire, à la fin, le refus initial d’Iblis, le Shaytan, de se soumettre à la volonté divine et de s’incliner, de se plier devant la nature spirituelle d’Adam dont il ne perçoit que les éléments psychiques et corporels. Cette méconnaissance de sa propre réalité spirituelle s’est imposée à l’homme moderne au point même que certains qui, en théorie, du moins, reconnaissent le ternaire Esprit, âme et corps, en arrivent, malgré tout, à confondre l’Esprit avec le psychisme, lequel est, par nature, individuel. Cette attitude est devenue une constante tant dans ce qu’il reste des organisations occidentales de métier que dans certaines branches occidentalisées d’organisations orientales. Elle traduit la prétention individuelle, personnelle, à exercer la Seigneurie avant d’avoir exercé la servitude. C’est ainsi que l’individu, fort d’une initiation virtuelle, lorsqu’elle n’est pas simplement imaginaire, finit par s’attribuer la condition propre aux connaissants de Dieu, alors qu’il ne s’est même pas mis en route et qu’il n’a pas encore commencé à œuvrer à l’extinction de son individualité.
L’œuvre du Shaykh Abd al-Wahid Yahya se suffit à elle-même en tant que corpus doctrinal, véritable synthèse et récapitulation métaphysique, en cette fin de cycle. Et si nous nous référons à lui, c’est parce qu’il a su être ce serviteur anonyme, totalement transparent, de Dieu l’Unique et s’effacer ainsi derrière la Doctrine métaphysique, une, immuable et primordiale comme l’est la Tradition elle-même. Nous disons que son œuvre doctrinale est, en tant que telle, suffisante, parce qu’elle suffit opérativement pour se mettre en route sur la voie, même si certains préfèrent limiter leurs efforts à spéculer ou à théoriser, de façon toute intellectualiste, à partir ou autour d’elle. Tel n’est pas l’objet de la Doctrine.
Au contraire, le Shaykh nous a rappelé très clairement, à travers cette dernière, les conditions du salut et celles de la « délivrance », délivrance que l’Islam évoque comme extinction en Dieu, fanah-biLlah. Tout aussi clairement, il nous a indique quelles étaient les conditions de la réalisation spirituelle : nécessité d’un ésotérisme et d’un exotérisme, de la Tariqah et de la Shari’ah ; nécessité d’un Maître et d’une méthode, avec l’assimilation, d’abord théorique de la doctrine, puis la réalisation de cette même doctrine avec toute la concentration des puissances de son être, dans chaque situation et à chaque moment de la vie, afin que le témoignage de l’Unité de Dieu devienne véritablement réel jusque dans notre sang, notre chair et nos os. Car si l’approche théorique de la doctrine est nécessaire dans un premier temps, elle n’est, bien entendu, pas suffisante. Le Shaykh rappelait qu’elle devait « s’accompagner ou précéder une réalisation effective », dont elle était d’ailleurs le seul but.
Le Shaykh nous informait aussi des limitations, en cette fin de cycle, de certaines formes religieuses qui n’offraient malheureusement plus d’ésotérisme et de l’amoindrissement même de certaines organisations initiatiques, précisant d’ailleurs le danger des infiltrations de l’Adversaire dans de telles formes ou organisations et même la possibilité de leur subversion en raison de leur caractère incomplet, à l’approche de la fin des temps qui verra l’apparition de l’Antéchrist. Antéchrist qui est l’aboutissement illusoire d’une démarche diabolique passant de la pseudo-tradition à l’anti-tradition et enfin à la contre-tradition qui se caractérisera par
l’utilisation d’éléments authentiquement traditionnels dans leur origine, mais détournés de leur véritable sens et mis en quelque sorte au service de l’erreur : ce détournement n’est, en somme, qu’un acheminement vers le retournement complet qui doit caractériser la contre-tradition... mais alors, il ne s’agira plus seulement de quelques éléments fragmentaires dispersés, puisqu’il faudra donner l’illusion de quelque chose de comparable et même d’équivalent selon l’intention de ses auteurs, à ce qui constitue l’intégralité d’une tradition véritable, y compris ses applications extérieures dans tous les domaines... C’est pourquoi on voit déjà s’esquisser notamment, dans les productions diverses dont l’origine où l’inspiration « contre-initiatique » n’est pas douteuse l’idée d’une organisation qui serait comme la contrepartie, mais aussi par là-même la contrefaçon, d’une conception traditionnelle telle que celle du « Saint-Empire », organisation qui doit être l’expression de la « contre-tradition », dans l’ordre social.
« L’illusion de l’Antéchrist repose sur l’erreur dualiste », nous dit le Shaykh. Or, celle-ci ne peut venir que de l’individualisme qui constitue l’écran psychique que seul le souffle de l’Esprit peut dissiper pour révéler l’Unité de Dieu, dans sa transcendance, mais aussi dans son immanence. Seule peut permettre la réalisation de l’Unité la pratique des rites exotériques d’abord, ésotériques ensuite, et surtout la véritable sincérité, non pas psychologique, mais celle fondée sur l’intention droite préexistante, sous la conduite d’un Shaykh et le contrôle d’une communauté qui ne sera, selon une tradition prophétique, « jamais unanime dans l’erreur ».
Il semble pourtant que les mises en garde du Shaykh n’aient pas été suffisamment prises en compte par ceux qui se sont souvent institués comme ses successeurs. Partout, il s’est agi, au fond, de préserver l’individualité, la vision toute individuelle et psychologique des choses, voire d’enrichir cette individualité ou cette personnalité, au besoin en se livrant à des syncrétismes ou au rassemblement de morceaux de traditions anciennes ou vivantes, sans tenir nullement compte de l’enseignement du Shaykh et de la doctrine qu’il avait pourtant clairement exposé. Au fond, l’on agit à l’inverse de l’injonction d’un des Pères de l’Église, Saint Thomas d’Aquin, qui rappelait qu’il s’agissait de « reconnaître la vérité quelle qu’elle soit », c’est-à-dire même, et surtout, si elle dérange notre individualité. Nous ajouterons qu’ayant reconnu cette vérité, il s’agit de la mettre en œuvre, de la réaliser.
Nous ne voudrions pas ici faire le catalogue détaillé de ces erreurs qui reposent toutes, on ne saurait trop y insister, à la suite du Shaykh, sur des erreurs individualistes mais seulement rappeler, parmi elles, les principales qui font obstacle, en ces temps de la fin, à la manifestation ultime de l’Esprit Christique de Dieu :
- refus de pratiquer les rites exotériques alors que seuls les rites peuvent trancher les divagations psychiques ;
- attribution d’une dimension ésotérique à des rites seulement exotériques ;
- double appartenance à des traditions différentes, même lorsqu’une des deux traditions est complète ;
- vision séparative de l’autorité spirituelle et du pouvoir temporel ;
- développement tout académique, théorique et imaginaire des aperçus donnés par René Guénon ou d’autres maitres ;
- prétention à se réaliser individuellement et solitairement en dehors de tout rattachement régulier, de toute communauté et de toute maîtrise régulière, là où tous ces supports existent.
Cette dernière erreur est encore accentuée par la prétention d’être des âfrad, des « solitaires en Dieu » alors que l’on n’est que des isolés, dans une individualité toute psychique. À cela s’ajoute encore la prétention à être rattaché directement à un centre caché, grâce à des investitures mystérieuses, prétention dont René Guénon évoquait l’imposture.
Et pour finir, l’on assiste à la tentative de rassembler, par le bas, des éléments disparates ou des organisations incomplètes, amoindries, pour ne pas dire infiltrées, afin de réaliser, de façon toute humaine, une prétendue « arche de la fin des temps», alors que le redressement appartient à Dieu seul. Ce redressement qui ne saurait, d’ailleurs, être, comme certains se l’imaginent, celui du seul Occident ou du seul Orient, mais bien un redressement unique car « à Dieu appartiennent l’Orient et l’Occident ».
Les tentatives de rassembler individuellement des choses disparates et parfois suspectes, qui rappellent plutôt la création d’un « Frankenstein » ou d’un « golem» n’ont, bien entendu, rien à voir avec la devise traditionnelle qui est d’ailleurs celle de VLT : « Rassembler ce qui est épars », devise dont le Shaykh Abd al-Wahid Yahya Guénon disait au contraire qu’elle ne signifiait rien d’autre que la réunification de l’être, et ce, afin d’en révéler l’Unité principielle, qui n’a pas à être reconstruite car elle est de toute éternité.
Ces erreurs et ces tentatives purement imaginaires ne prêteraient qu’à sourire en d’autres temps, si elles ne cachaient l’entreprise redoutable évoquée plus haut et dont le Shaykh nous avait averti. Nous craignons en effet que tant du côté chrétien que du côté musulman l’on ne reconnaisse pas le Christ de la seconde venue, Issa (alayhi-s-salam), fils de Marie, ultime manifestation divine et sceau de la sainteté que la tradition islamique identifie comme Ruh Allah, l’Esprit de Dieu, et même comme Esprit Royal de Dieu. Nous craignons même que l’on prenne le Christ pour l’Antéchrist et l’Antéchrist pour le Christ.
Du côté chrétien, l’on risque d’attendre la manifestation d’une image exclusive d’un Jésus qui est de plus en plus homme et de moins en moins Esprit. La prétention à une spécificité « chrétienne» non réductible à la Tradition primordiale ne peut que nous inquiéter. Aucune tradition ne saurait être supérieure à la Tradition qui en est la source unique et la trame essentielle, au regard de laquelle toute « spécificité contingente» est nulle et non avenue. Cette « spécificité » revendiquée ne cacherait-elle pas, en fait, un ajout innovant au Christianisme-même, ajout qui serait comme l’imperceptible et subtil trou noir qui distingue le Messie de l’Imposteur, alors qu’une tradition prophétique rapporte que « les innovations finissent dans le feu ». De même, lorsqu’on admet, en principe, ou plutôt en théorie, l’unité et la validité de toutes les traditions, l’on a souvent du mal à reconnaître que cette unité et cette validité puissent s’étendre à l’Islam, l’ultime révélation.
Pourtant, l’on ne saurait ignorer que c’est dans l’Islam que René Guénon réalisait au quotidien la doctrine universelle et primordiale qu’il nous a transmise. Ces réserves voire ces dénégations vis à vis de l’Islam font très certainement obstacle à l’aide intellectuelle et spirituelle que René Guénon appelait de ses vœux et qui peut venir de l’Islam initiatique, même s’il ne s’agit pas, bien entendu, d’entrer obligatoirement dans l’Islam, et encore moins de reconnaître la prétendue « loi totale » d’un Islam formaliste et intégriste.
Il ne faudrait pas ignorer non plus que Réalité Métaphysique et Révélation sont la même chose ni l’apport que les révélations successives peuvent également donner aux croyants dans les révélations précédentes. Toute révélation est porteuse d’une miséricorde et d’une clarification. « Et à toi, nous avons révélé un livre selon la Vérité pour confirmer les Écritures révélées précédemment et pour les protéger », dit le Coran. Cette fonction de confirmation et de protection des révélations antérieures parla Révélation ultérieure consiste à aider les précédentes à retrouver, à révéler, à nouveau, leur nature primordiale et leur universalité. C’est, en quelque sorte, contribuer, après leur phase descendante, celle d’une incarnation en une Loi ou un Homme, à leur remontée vers leur Source Unique, Dieu Lui-même, à travers l’influx et le reflux de Son Esprit qui n’est autre que le souffle christique.
Du côté musulman, nous craignons que l’on ne reconnaisse pas, dans un Islam devenu purement formel, la manifestation ultime de l’Esprit divin à travers justement ce souffle et cette seconde venue du Christ. Alors que le Prophète lui-même nous mettait en garde, dans un hadith annonçant les temps que nous vivons, contre un « islam » « abaissé et réduit à un pur formalisme aux couleurs islamiques », un Islam qui a oublié la présence bien réelle de Jésus, exclusivement attaché à la seule image historique et même ethnique du Prophète Muhammad, plutôt qu’à sa réalité Prophétique, celle d’une Miséricorde universelle. Alors que le Prophète lui-même rappelait à sa communauté que « Nul n’a plus de droit que moi de se réclamer de Jésus» en raison de sa proximité, et qu’il donnait comme ultime injonction, à propos du Christ de la seconde venue, « Sachez le reconnaître ! ». « Comment, dit le Prophète, ferez-vous, lorsque le fils de Marie descendra parmi vous et que votre imam sera l’un des vôtres », alors que « les arabes seront peu nombreux » et que « les gens de l’Occident seront fidèles à la Vérité jusqu’à la fin ».
C’est à partir du cadre de nos religions réciproques qu’il nous appartient selon la parole du Shaykh al-Alawi d’« élever notre esprit au dessus de nos âmes », pour retrouver et manifester la Tradition Unique et primordiale, qui n’est autre que celle de Dieu l’Unique. Ce n’est pas à travers l’appel à une soi-disant loi intégrale islamique dont les prétentions parfois pseudo-ésotériques sont même véhiculées en Orient mais aussi en Occident par des « solitaires » ou même, malheureusement, par des organisations initiatiques, que se réalisera le véritable Islam dans son universalité. René Guénon évoquait ainsi « celui qui devra préparer le redressement de l’Orient et de l’Occident dans l’attente de la venue de Jésus ». Ibn Arabi précisait que celui-ci, le Bien-Guidé, le Mahdi, de la tradition islamique « rétablira la religion pure. Il insufflera l’Esprit dans l’Islam. Il fera apparaître la religion telle qu’elle est. » C’est-à-dire en tant que Tradition primordiale qui est, pourrait-on dire, à la fois Islam, comme pure soumission à Dieu, Catholicisme dans le sens d’universalité, et Orthodoxie, dans le sens de la conformité à la Réalité métaphysique.
Cet Esprit « insufflé à nouveau » n’est autre que l'Esprit Christique, l’Esprit de Dieu. Il nous appartient à tous, sans exclusive, chacun à partir de notre propre révélation, de retrouver la sincérité de notre enfance, lorsque nous étions véritablement soumis à Dieu, en toute immanence et transparence, de trouver le véritable discernement de l’Esprit, en abandonnant nos conjectures individuelles, en Lui demandant de nous guider vers les moyens nécessaires à notre salut et à notre réalisation.
Nous pourrons alors, si Dieu le veut, réaliser cette communauté unanime et autonome, en Esprit et Vérité, qui n’est autre que celle des Élus ou de l’Élite de toutes les révélations, cette communauté bien-dirigée, sur laquelle descendra, à la fin, Jésus, l’Esprit christique, l’Esprit Royal de Dieu, qui y apposera le sceau de la Sainteté, sceau qui n'est autre que le symbole unique d'une circonférence bien centrée.